Notes 

La démarque inconnue dans la grande distribution

PhD

La démarque c'est l'ensemble des pertes liées au stock subi par un magasin.

On distingue la démarque connue (casse, vol répertorié,...) de la démarque inconnue, qui a pour source aussi bien les vols que toutes les erreurs liées à la manipulation des produits (erreurs de réception, comptables, de caisse, consommation sur place...). Au plan comptable la démarque inconnue est égale à la différence entre le montant du stock théorique et la valeur du stock réel.

En valeur, elle représente aux environs de 1% du chiffre d'affaires du magasin (soit pour le nouvel ensemble Carrefour-Promodes près de 3,5 milliards de Francs!). Dans certaines familles de produits elle peut atteindre 5 à 7 % du CA.

La majeure partie de cette démarque vient des vols des clients et des vols du personnel (on considère souvent une répartition 50-50, mais si pour les clients de très nombreux clients chapardent pour des sommes unitaires peu importantes, pour le personnel il est concentré sur quelques individus pour des montants très importants). La menace du licenciement pour faute lourde en cas de vol et de poursuites pénales ne semblent pas suffisamment dissuasive.

Pourquoi cette démarque ?

Elle est en grande partie imputable à la formule du libre-service. Les grands magasins du siècle dernier la connaissaient déjà et utilisaient des inspecteurs internes pour la lutter. Elle s'est amplifiée avec les formes plus modernes de la distribution et la désertification des rayons par les employés, ainsi que par l'abondance de biens tentant et facilement renégociables.

Dire qu'elle est voulue serait exagéré car elle est une perte sèche pour le magasin. Mais la combattre coûte très cher : cela peut nécessiter une surveillance par du personnel mais aussi une restructuration du magasin pour éviter des angles morts, des systèmes d'alarme… Mais elle est parfois considérée comme un mal nécessaire, la forme radicale de lutte qui serait l'abandon du libre service, étant sans doute beaucoup trop coûteux pour la distribution.

Les moyens de lutte

Le déréférencement de produits trop souvent volés est parfois l'antidote pratiqué. L'utilisation d'emballages plus résistants, les systèmes antivol avec alarmes aux caisses de sortie, la mise en place de vitrines pour certains produits... font partie de l'arsenal traditionnel.

La mise en place de système de surveillance fait partie des armes classiques. Elle combine souvent surveillance interne par les employés des rayons et des surveillants spécialisés, et le recours à des prestataires externes.

Dans les magasins de petite dimension, il est rare de trouver des surveillants. Ce rôle est dévolu au personnel du magasin : caissières, employés chargés de la mise en rayon, les vendeurs et les responsables du magasin. Les limites de cette méthode : la lutte contre la démarque passe au second rang, après la fonction principale des employés. En outre les employés postés n'ont qu'une capacité de surveillance limitée.

Le recours à des surveillants spécialisés apparaît quand le magasin grandit ou s'il présente des montants de démarque anormalement élevés. Dans une même chaîne de supermarchés, et pour des magasins de taille et de chiffre d'affaires équivalents on trouvera donc des magasins avec ou sans surveillants. C'est bien le ratio coût de la surveillance / espérance de diminution de la démarque qui est le critère déterminant. Peuvent se rajouter dans certains cas d'autres considérations comme la nécessité de "protéger" le personnel ou les clients. Dans ce cas on combine souvent surveillants interne et personnel mis à disposition par un prestataire extérieur. Cette formule permet de faire tourner les équipes de surveillance sur une région pour éviter leur repérage trop facile par les voleurs. Elle peut se faire de visu ou via systèmes de caméra interposés. Ces surveillants contrôlent aussi bien le personnel que les clients.

L'action des surveillants est très contraintes par le code de procédure pénale. Il n'ont que les pouvoirs d'un citoyen ordinaire (empêcher qu'un crime flagrant se commette, interpeller l'auteur d'un délit et le remettre aussitôt à la disposition d'un OPJ, fouille interdite...). Il ne peuvent intervenir avant que la personne ait franchie la ligne de caisse puisque le délit n'est pas encore constitué. Leur intervention hors les murs du magasin est difficile. Les relations avec les forces de police sont parfois tendues car elles peuvent être appelées plusieurs dizaines de fois par jour dans un même magasin pour des faites jugés mineurs. Des procédures de dépôt de plainte simplifiées sont parfois utilisées. Il y a souvent incompréhension du rôle de la police et de la justice par les responsables de magasin ou de la sécurité : pour des faits bénins et en l'absence de récidive, on retrouve les personnes interpellées dans la journée dans le magasin. Les décisions de classement varient notamment en fonction des régions.

Des systèmes de "primes sur résultats" sont parfois utilisés pour motiver les surveillants. La multiplication des contrôles peut être pénalisante en terme de relation clientèle. Il y a toujours une recherche entre coût de la mesure et efficacité attendue. Ainsi les antivols textiles sont-ils changés non en raison de leur obsolescence technique, mais parce que les voleurs se sont adoptés. Un système "ancien" peut être très efficace quelque temps dans un magasin où il n'a pas été encore utilisé.